31 mars 2013

It's The New Jack Swing !



Quand j'entre dans l'adolescence au tout début des années 90, c'est souvent au hasard que je dois attribuer la découverte d'une chanson. Pas de Shazam. Pas de blogs. Pas de Soundcloud ou YouTube. Pas de Spotify. Surtout, je suis complètement dépendant de ce qu'un programmateur, pas toujours bienveillant, veut bien me faire écouter.

Je suis en quatrième quand je découvre Bobby Brown. On est en 1992. Le morceau Humpin' Around passe à la radio. Choc musical immédiat. Avant ça, la musique qui passait dans mes oreilles était de la pop-music et de l'eurodance. C'était les trucs que les programmateurs de radio, en Europe, voulaient bien nous faire écouter. Alors, c'est ce qu'on écoutait. On avait pas vraiment le choix, en fait. C'était les seuls disques qu'on trouvait, de toute façon. Et payer 200 francs un disque en import quand on a 30 francs d'argent de poche par mois, impossible.

Mais, par la grâce d'un programmateur moins fainéant (celui de l'émission Rapline sur M6), je découvrais le rap à cette époque. Vers 91-92. Je n'étais qu'un pré-ado qui commençait à peine à muer mais NTM et Public Enemy m'ont appris la vie. La rébellion naturelle de l'adolescence, c'est par eux qu'elle a commencé à s'exprimer. Elle était cantonnée à ma tête (Introverts Power !) mais elle était bien vivace.

Et donc voilà ce que j'ai trouvé chez Bobby Brown : la puissance mélodique des tubes pop que j'adorais (Madonna, les New Kids On The Block, les tubes de Stock Aitken & Waterman pour Kylie Minogue et Jason Donovan) et l'attitude rentre-dedans des rappeurs que je commençais à idolâtrer. Pour  un Américain, avoir un choc musical avec Humpin' Around releverait sûrement de l'absurde tant le morceau (même si génial) reste très anecdotique dans l'histoire de la pop music. Mais voilà, j'étais français (de surcroît, provincial) et le genre de musique pratiqué par Bobby n'avait, jusque là, jamais réellement franchi l'Atlantique. Encore moins les frontières de ma province.

Il ne m'a pas fallu trop longtemps pour découvrir que mon choc musical avait un nom : le New Jack Swing. Certes, sans Wikipedia, il m'a fallu un peu plus de vingt secondes (probablement quelques mois) pour tout apprendre sur cette musique. Le New Jack Swing avait été inventé par Teddy Riley qui avait réussi à mélanger la légéreté des arrangements de la "dance-pop", le côté brut du Hip-Hop et les mélodies suaves du "contemporary R&B".

Le New Jack Swing mélangeait Anita Baker avec Public Enemy, Madonna avec DeBarge, Alexander O'Neal avec Gang Starr, Luther Vandross avec Eric B & Rakim. Dans mes oreilles de petit français qui commençait à peine à rencontrer le rap, le New Jack Swing faisait figure de révolution. Ce que les Américains ont appelé le "contemporary R&B" n'avait en effet jamais atteint les charts français qui s'étaient contenté, dans les années 80, des reliques disco/funk des années 70 comme Kool & The Gang et Earth Wind & Fire.

Dans mes recherches, je re-découvrais donc le Rythm Nation de Janet Jackson (que je n'avais jamais vraiment aimé jusque là). Je découvrais Bell Biv Devoe dans un épisode du Prince de Bel-Air et la chanson Motownphilly des Boyz II Men dans un épisode de La Fête à la Maison. Je voyais au cinéma des films comme Boomerang et Mo Money qui en était rempli. Je découvrais Wreckx-N-Effect, Public Announcement, Aaron Hall, Jodeci et des dizaines d'autres dans les compils New Jack USA qui tournaient en boucle sur ma platine CD. J'explosais surtout le compteur des lectures du Dangerous de Michael Jackson, l'album de New Jack Swing (produit par Teddy Riley) le plus vendu au monde.



Entre 1992 et 1994, je n'écoutais presque que ça. Deux années. Pendant deux ans, je me suis nourri presque uniquement de New Jack Swing. Mais, dommage pour moi, j'arrivais très tard. La France avait découvert le style avec Bobby Brown en 1992 et s'en était vraiment emparé que deux ans plus tard. Les Etats-Unis, eux, l'avait découvert cinq ans plus tôt... en 1987. Et oui, comme (presque) toujours, c'est à peu près le temps qu'il fallait aux musiques pour franchir l'Atlantique, la France avec sa traditionnelle "variété" étant souvent la dernière à sortir de son coma.

Donc, malheureusement, si Teddy Riley avait inventé le style à la fin des années 80 avec le premier album de son premier groupe, Guy, il a sonné lui-même son glas avec le premier album de son deuxième groupe, Blackstreet. Les titres Booti Call et U Blow My Mind, étaient devenu mes hymnes mais il était trop tard : la fin était là. Car pendant ce temps là, les Etats-Unis étaient déjà en train de passer à autre chose : Puff Daddy avait "inventé" Mary J. Blige. Le Hip-Hop avait pris ses aises dans les Charts américains et les sons s'étaient endurcis. Il en était terminé du New Jack Swing, cette "parenthèse enchantée" qui avait permis au R&B de franchir pas mal de barrières musicales.

Le New Jack Swing, c'était sept années. 1987-1994. Pas plus. Pas moins. Pourtant, en France, on a continué à parler de "New Jack". Quand j'étais au lycée, à une époque où le genre avait "plus ou moins" complètement disparu, tout le monde continuait de parler de "New Jack" dès qu'il s'agissait de qualifier un morceau de "musique noire chantée et influencée par le rap". Puis, il y a eu cette expression un peu abscons et un peu anachronique vendue par les maisons de disques et les médias : le "groove".  On était à la fin des années 90. Je sais pas comment est finalement arrivé le mot R&B au début des années 2000 mais le terme a finalement réussi à faire son chemin dans la tête des Français. Encore et toujours ce retard à assimiler tout ce qui fait la culture pop.

D'où un phénomène ces derniers temps sur les blogs musicaux français. On parle de R&B pour qualifier une musique qui n'aurait existé que depuis 1996. Et je vous avoue : ça me fait mal au coeur. Lire des choses qui laisserait penser que "No Diggity", "The Boy Is Mine" ou "Family Affair" aurait inventé le R&B. Quand je lis des absurdités pareilles, j'ai l'impression qu'on piétine mon adolescence. Putain de jeunes nés dans les années 90. Aucun respect !

Alors, voilà. J'ai fait une playlist sur Spotify uniquement dédiée au New Jack Swing, le vrai, l'unique, celui qui n'a existé qu'entre 1987 et 1994, celui qui nous faisait danser le "running man" dans les boom avant d'entamer les slows, celui qui me fait encore frissonner d'un plaisir nostlagique sans pareil... Enjoy.

Aaron Hall - It's Gonna Be Alright
After 7 - In The Heat of The Moment
Al B. Sure - Nite And Day
Alexander O'Neal - Criticize
Bell Biv DeVoe - Poison
Big Daddy Kane ) I Get The Job Done
Blackstreet - U Blow My Mind
Blackstreet - Booti Call
Bobby Brown - Don't Be Cruel
Bobby Brown - My Prerogative
Bobby Brown - Humpin' Around
Bobby Brown - Two Can Play That Game
Boyz II Men - Motownphilly (Original)
Christopher Williams - I'm Dreamin'
Color Me Badd - I Wanna Sex You Up
Guy - Wanna Get With U
Guy - Groove Me
Guy - Teddy's Jam
Heavy D & The Boyz  feat. Aaron Hall - Now That We Found Love
Hi-Five - She's Playing Hard To Get
James Ingram - It's Real
Janet Jackson - Rythm Nation
Janet Jackson - Miss You Much
Janet Jackson - Love Will Never Do (Withour You)
Jodeci - Feenin'
Joe - The One For Me
Joe Public - Live And Learn
Teddy Riley feat. Tammy Lucas - Is It Good To You
Aaron Hall - Don't Be Afraid
Karyn White - Secret Rendez-Vous
Keith Sweat - I Want Her
The Laface Cartel - Reversal Of A Dog
Mary J. Blige - Changes I've Been Going Through (Teddy Riley Remix)
Michael Jackson - Remember The Time
Luther Vandross & Janet Jackson - The Best Things In Life Are Free
New Edition - If It Isn't Love
Portrait - Here We Go Again
R. Kelly & Public Announcement - She's Got That Vibe
Ralph Tresvant - Sensitivity
Redhead Kingpin - Do The Right Thing
Starpoint - I Want You - You Want me
SWV - Right Here (Human Nature Remix)
SWV - I'm So Into You
TLC - What About Your Friends
Tony! Toni! Toné - Feels Good
Troop - Spread My Wings
Wreckx-N-Effect - Rump Shaker


(P.S. : On pourrait considérer "This Is How We Do It" de Montell Jordan, sorti en 1995, comme du New Jack Swing. Musicalement, ça l'est clairement. Mais la chanson était déjà tellement anachronique  et "à part" dans le contexte de l'époque que j'arrive pas à l'inclure)




21 mars 2013

Pourquoi tant de haine contre Anne Hathaway –et d'amour pour Jennifer Lawrence?



J'ai fait un article sur Jennifer Lawrence, l'actrice que tout le monde adore, et Anne Hathaway, l'actrice que tout le monde adore détester.

C'est sur Slate.fr...