Si vous êtes un garçon et avez été adolescent au début des années 90, il y a probablement un film qui ne vous aura pas laissé indifférent. Je ne vois pas comment il pourrait en être autrement.
A l'époque, il n'y avait ainsi pas plus grande fierté pour un garçon en pleine puberté que de rentrer dans une salle projetant ce film... interdit aux moins de 16 ans. Car oui, la star du collège, en 1992, n'était pas celui qui avait le plus grand talent au foot. Ce n'était pas non plus celui qui sortait avec la plus belle fille. Non. La vraie star, c'était celui qui avait réussi à rentrer dans ce qui s'apparentait alors au deuxième endroit le plus inaccessible du monde - l'entrejambe des filles arrivant alors en premier mais, compte tenu que même le fond de leur gorge était (pour la plupart d'entre nous) déjà inaccessible, il valait mieux ne pas trop y penser (ou alors juste dans l'intimité if you know what I mean).
Bref...
Cet endroit, capable de faire naître des stars, c'était une salle projetant BASIC INSTINCT. Pouvoir raconter, l'equalizer de la voix hésitant encore entre les graves et les aigus, à tous ses petits camarades boutonneux à quoi ressemblait la foufoune de Sharon Stone en cinémascope, pouvait donc faire de vous une icône dans le confinement de la cour de recrée. Et autant vous dire que leur titre de "nouvelle star" de la cour de récrée était à l'époque très souvent remis en jeu. Car les adeptes de l'incendiaire blonde ne pouvaient décemment laisser passer, dès l'année suivante, la sortie de SLIVER.
Et le pire dans tout ça est qu'il n'y avait pas que Sharon Stone pour combler les fantasmes des jeunes hommes en fleurs de la fin des années 80 et début des années 90. Il y avait aussi Kim Basinger avec 9 SEMAINES ET DEMI et SANG CHAUD POUR MEURTRE DE SANG FROID. Il y avait Sherylin Fenn avec BOXING HELENA. Il y avait Ellen Barkin avec SEA OF LOVE. Il y avait Rebecca De Mornay avec EXCÈS DE CONFIANCE. Il y avait Jane March avec COLOR OF NIGHT. Il y avait Bridget Fonda et Jennifer Jason Leigh avec JEUNE FEMME PARTAGERAIT APPARTEMENT. Il y avait Linda Fiorentino avec THE LAST SEDUCTION et JADE. Il y avait Teri Hatcher avec COOL SURFACE. Il y avait Alicia Silerstone avec THE CRUSH. Il y avait Jennifer Tilly et Gina Gershon avec BOUND. Il y avait Glenn Close avec LIAISON FATALE. Il y avait Drew Barrymore avec POISON IVY. Il y avait Virginia Madsen et Jennifer Jason Leigh avec THE HOT SPOT. Et il y avait évidemment Demi Moore avec HARCÈLEMENT et PROPOSITION INDÉCENTE.
Et oui, pendant cette petite dizaine d'années, à peu près entre 1986 et l'incroyable succès de 9 SEMAINES ET DEMI et le flop de JADE en 1995, Hollywood a oublié sa pudibonderie naturelle pour sortir massivement des films fortement concentrés en sexe - parfois assez explicite.
C'est l'apogée d'un sous-genre cinématographique : le thriller érotique.
Des films qui non seulement parlent de cul en montrant du cul comme de bons vieux films érotiques. Mais aussi des films avec du danger, des tueurs en séries et autres psychopathes. Et au grand damne de ces millions d'adolescents boutonneux qui se sont paluchés sur ces films à défaut de mieux (quoiqu'il y avait bien le catalogue de La Redoute), c'est bien l'aspect "danger" qui faisait l'intérêt du sous-genre. Mais aussi ce qui a causé sa perte et explique le désamour du public à la fin des années 90.
Dans un article référence du Hollywood Reporter datant d'avril 2006 faisant écho au bide inter-galactique de BASIC INSTINCT 2, la journaliste pointait, via ses interlocuteurs, le retour de l'ordre moral de l'ère Bush, le manque de scripts intéressants, le refus des jeunes stars à se "mouiller" et surtout la démocratisation du porno sur Internet comme les raisons de ce désintérêt grandissant du public pour voir du "sexe à suspense" en Cinémascope.
Toutes ces explications sont très objectives et probablement très vraies. L'article datant de quatre ans, je leur rajouterais même le phénomène encore plus récent de la sextape qui, aujourd'hui, se trouve être, malheureusement, le moyen le plus rapide et efficace pour devenir un sex-symbol 2.0. Un statut certes éphémère mais on peut pas dire que la carrière de sex-symbol de Jane March et de ses collègues ait été très longue non plus.
Mais je crois, comme écrit plus haut, que la vraie raison du succès éphémère du sous-genre réside dans l'aspect "danger" et plus précisément dans la relation "sexe/danger", une thématique plus que présente dans l'imaginaire collectif des dix années qui ont suivis la découverte du virus du SIDA (1983). Et de ce point de vue, BASIC INSTINCT, avec ses meurtres au pic à glace en plein orgasme, est quand même le summum absolu de la métaphore "Sexe = Mort". Alors tout cela relève évidemment de l'inconscient et n'est pas toujours très subtil. Certes.
Mais ce genre de symbole a clairement boosté le box-office d'autres films et sous-genres à d'autres époques. Pensez AVATAR et sa fameuse parabole écologique. Pensez également à tous les films métaphoriquement anti-maccarthystes dans les années 50 comme ON MURMURE DANS LA VILLE de Joseph Mankiewicz, LA NUIT DU CHASSEUR de Charles Laughton, LE TRAIN SIFFLERA TROIS FOIS de Fred Zinnemann ou LES SORCIERES DE SALEM de Raymond Rouleau d'après la pièce d'Arhur Miller. Et bien sûr, difficile de passer à côté de la vague récente du sous-genre "film de fin du monde" qui inonde le cinéma depuis les attaques terroristes du 11 septembre et les guerres en Afghanistan et en Irak, des FILS DE L'HOMME à LA GUERRE DES MONDES en passant par les très récents LIVRE D'ELI et LA ROUTE.
Bref, le thriller érotique correspondait à son époque, faisant à la fois son succès et propulsant sa mort. Sa morale était celle de son temps : "Si tu fais pas gaffe avec qui tu couches, tu crèves." Le virus étant, dans les films, juste remplacé par un tueur en série. Et si Michael Douglas est aujourd'hui toujours marié à la même femme depuis plus de 10 ans, c'est peut-être qu'il a bien retenu la leçon de cette époque où il a enquillé LIAISON FATALE, BASIC INSTINCT et HARCÈLEMENT ! Je ne suis donc pas sûr qu'il revienne un jour - en tous les cas avec succès (voir les bides de FEU DE GLACE avec Heather Graham, de IN THE CUT avec Meg Ryan ou de CHLOÉ avec Julianne Moore).
Et c'est bien dommage car Sharon Stone en cinémascope, c'était (c'est) quand même autre chose que Paris Hilton sur YouPorn !
A l'époque, il n'y avait ainsi pas plus grande fierté pour un garçon en pleine puberté que de rentrer dans une salle projetant ce film... interdit aux moins de 16 ans. Car oui, la star du collège, en 1992, n'était pas celui qui avait le plus grand talent au foot. Ce n'était pas non plus celui qui sortait avec la plus belle fille. Non. La vraie star, c'était celui qui avait réussi à rentrer dans ce qui s'apparentait alors au deuxième endroit le plus inaccessible du monde - l'entrejambe des filles arrivant alors en premier mais, compte tenu que même le fond de leur gorge était (pour la plupart d'entre nous) déjà inaccessible, il valait mieux ne pas trop y penser (ou alors juste dans l'intimité if you know what I mean).
Bref...
Cet endroit, capable de faire naître des stars, c'était une salle projetant BASIC INSTINCT. Pouvoir raconter, l'equalizer de la voix hésitant encore entre les graves et les aigus, à tous ses petits camarades boutonneux à quoi ressemblait la foufoune de Sharon Stone en cinémascope, pouvait donc faire de vous une icône dans le confinement de la cour de recrée. Et autant vous dire que leur titre de "nouvelle star" de la cour de récrée était à l'époque très souvent remis en jeu. Car les adeptes de l'incendiaire blonde ne pouvaient décemment laisser passer, dès l'année suivante, la sortie de SLIVER.
Et le pire dans tout ça est qu'il n'y avait pas que Sharon Stone pour combler les fantasmes des jeunes hommes en fleurs de la fin des années 80 et début des années 90. Il y avait aussi Kim Basinger avec 9 SEMAINES ET DEMI et SANG CHAUD POUR MEURTRE DE SANG FROID. Il y avait Sherylin Fenn avec BOXING HELENA. Il y avait Ellen Barkin avec SEA OF LOVE. Il y avait Rebecca De Mornay avec EXCÈS DE CONFIANCE. Il y avait Jane March avec COLOR OF NIGHT. Il y avait Bridget Fonda et Jennifer Jason Leigh avec JEUNE FEMME PARTAGERAIT APPARTEMENT. Il y avait Linda Fiorentino avec THE LAST SEDUCTION et JADE. Il y avait Teri Hatcher avec COOL SURFACE. Il y avait Alicia Silerstone avec THE CRUSH. Il y avait Jennifer Tilly et Gina Gershon avec BOUND. Il y avait Glenn Close avec LIAISON FATALE. Il y avait Drew Barrymore avec POISON IVY. Il y avait Virginia Madsen et Jennifer Jason Leigh avec THE HOT SPOT. Et il y avait évidemment Demi Moore avec HARCÈLEMENT et PROPOSITION INDÉCENTE.
Et oui, pendant cette petite dizaine d'années, à peu près entre 1986 et l'incroyable succès de 9 SEMAINES ET DEMI et le flop de JADE en 1995, Hollywood a oublié sa pudibonderie naturelle pour sortir massivement des films fortement concentrés en sexe - parfois assez explicite.
C'est l'apogée d'un sous-genre cinématographique : le thriller érotique.
Des films qui non seulement parlent de cul en montrant du cul comme de bons vieux films érotiques. Mais aussi des films avec du danger, des tueurs en séries et autres psychopathes. Et au grand damne de ces millions d'adolescents boutonneux qui se sont paluchés sur ces films à défaut de mieux (quoiqu'il y avait bien le catalogue de La Redoute), c'est bien l'aspect "danger" qui faisait l'intérêt du sous-genre. Mais aussi ce qui a causé sa perte et explique le désamour du public à la fin des années 90.
Dans un article référence du Hollywood Reporter datant d'avril 2006 faisant écho au bide inter-galactique de BASIC INSTINCT 2, la journaliste pointait, via ses interlocuteurs, le retour de l'ordre moral de l'ère Bush, le manque de scripts intéressants, le refus des jeunes stars à se "mouiller" et surtout la démocratisation du porno sur Internet comme les raisons de ce désintérêt grandissant du public pour voir du "sexe à suspense" en Cinémascope.
Toutes ces explications sont très objectives et probablement très vraies. L'article datant de quatre ans, je leur rajouterais même le phénomène encore plus récent de la sextape qui, aujourd'hui, se trouve être, malheureusement, le moyen le plus rapide et efficace pour devenir un sex-symbol 2.0. Un statut certes éphémère mais on peut pas dire que la carrière de sex-symbol de Jane March et de ses collègues ait été très longue non plus.
Mais je crois, comme écrit plus haut, que la vraie raison du succès éphémère du sous-genre réside dans l'aspect "danger" et plus précisément dans la relation "sexe/danger", une thématique plus que présente dans l'imaginaire collectif des dix années qui ont suivis la découverte du virus du SIDA (1983). Et de ce point de vue, BASIC INSTINCT, avec ses meurtres au pic à glace en plein orgasme, est quand même le summum absolu de la métaphore "Sexe = Mort". Alors tout cela relève évidemment de l'inconscient et n'est pas toujours très subtil. Certes.
Mais ce genre de symbole a clairement boosté le box-office d'autres films et sous-genres à d'autres époques. Pensez AVATAR et sa fameuse parabole écologique. Pensez également à tous les films métaphoriquement anti-maccarthystes dans les années 50 comme ON MURMURE DANS LA VILLE de Joseph Mankiewicz, LA NUIT DU CHASSEUR de Charles Laughton, LE TRAIN SIFFLERA TROIS FOIS de Fred Zinnemann ou LES SORCIERES DE SALEM de Raymond Rouleau d'après la pièce d'Arhur Miller. Et bien sûr, difficile de passer à côté de la vague récente du sous-genre "film de fin du monde" qui inonde le cinéma depuis les attaques terroristes du 11 septembre et les guerres en Afghanistan et en Irak, des FILS DE L'HOMME à LA GUERRE DES MONDES en passant par les très récents LIVRE D'ELI et LA ROUTE.
Bref, le thriller érotique correspondait à son époque, faisant à la fois son succès et propulsant sa mort. Sa morale était celle de son temps : "Si tu fais pas gaffe avec qui tu couches, tu crèves." Le virus étant, dans les films, juste remplacé par un tueur en série. Et si Michael Douglas est aujourd'hui toujours marié à la même femme depuis plus de 10 ans, c'est peut-être qu'il a bien retenu la leçon de cette époque où il a enquillé LIAISON FATALE, BASIC INSTINCT et HARCÈLEMENT ! Je ne suis donc pas sûr qu'il revienne un jour - en tous les cas avec succès (voir les bides de FEU DE GLACE avec Heather Graham, de IN THE CUT avec Meg Ryan ou de CHLOÉ avec Julianne Moore).
Et c'est bien dommage car Sharon Stone en cinémascope, c'était (c'est) quand même autre chose que Paris Hilton sur YouPorn !
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