Il va falloir que je crée une rubrique rien que pour eux. Après Tommy Wiseau et Tucker Max, voici un nouveau loser magnifique de la pop culture made in USA : Troy Duffy. Encore un type au parcours rocambolesque et à l'égo si surdimensionné qu'il ferait passer Alain Delon pour l'inventeur de l'humilité.
Pour bien visualiser le personnage, il faut vous imaginer l'allure mastoc d'un joueur de football tendance défenseur - comprenez gras du bide - le bouc de l'Américain moyen de rigueur et la boule à zéro. Car le premier métier de Duffy - peut-être même sa vocation - c'est barman. Mais pas barman de l'Hôtel Costes. Brman du J. Sloan's, un bouge de West Hollywood (la zone !) qu'il dirige armé d'une batte de base-ball. Un outil bien utile pour vider les quelques poivreaux, sauvageons et crackheads qui oseraient franchir les portes de son établissement. Je pense que vous voyez bien là de quoi on parle.
Des rêves de gloire plein la tête, Duffy veut se faire un nom à Hollywood. Pour ça, il a deux pistes : son groupe de rock The Brood et un scénario intitulé THE BOONDOCK SAINTS. S'inspirant de ses "envies" de vider les dealers de sa cage d'escaliers, il crée ainsi deux personnages, les frères McManus, tueurs à gages spécialisés dans l'élimination des seigneurs de la drogue de Boston avec le FBI à leurs trousses. On est en 1996 et l'époque est aux anti-héros criminels popularisés par Quentin Tarantino dans PULP FICTION.
C'est donc assez naturellement que le script finit par arriver sur le bureau de Harvey Weinstein, le Pygmalion de Tarantino, Kevin Smith et Robert Rodriguez. Normal que le mec s'intéresse à un type pas vraiment démoulé comme Duffy. Tellement normal qu'avec la folie des grandeurs qu'on lui connaît désormais, il lui offre 15 millions de dollars pour faire son film, accepte que The Brood enregistre la bande son et propose même de racheter le J. Sloan's !
Bref, en 1997, le barman crasseux de West Hollywood se transforme en Cendrillon d'Hollywood. C'est acté : Duffy est le "prochain Tarantino". Le deal avec Miramax fait même la couverture d'USA Today et l'apprenti-réalisateur rencontre alors Mark Wahlberg, Brendan Fraser, Vincent D'Onofrio, Billy Zane, Jeff Goldblum et même un jeune Heath Ledger. Le mec est le nouveau roi du pétrole !
Sauf que... (et c'est là que les versions divergent).
Dès la fin de l'année 1997, le deal avec Miramax est rompu (avant que Harvey ne rachète le bar - merde !). La raison ? D'un côté, on dit que Weinstein et Duffy n'était pas d'accord sur le casting et que les deux se sont séparés d'un commun accord. De l'autre, on dit que Duffy a pris une de ces grosses têtes qui vous font exploser en plein vol et que, trop occupé, refusait de parler à qui que ce soit - même si ce qui que ce soit s'appelait Pitt ou Stallone. Il se raconte même que Duffy manqua d'engager Ewan McGregor, lors de leur premier entretien, à cause d'une dispute futile sur la peine de mort ! EPIC FAIL.
Finalement, une autre société de prod financera quelques années plus tard le film à hauteur de 6 millions de dollars (soit 2 fois moins que les Weinstein !) avec un casting composé tout de même de Willem Dafoe (dans un rôle de grande folle totalement surréaliste), Billy Connolly et Sean Patrick Flanery et Norman Reedus dans les rôles des deux frères. Tournage somme-toute rock'n roll durant lequel les principaux protagonistes se rappellent surtout les beuveries dans la villa louée pour l'occasion, les barbecues, les "orgies" dans le jacuzzi et les virées dans les clubs de strip-tease. Je pense que vous saisissez le tableau... D'autant que les seuls personnages féminins du film sont au choix deux prostituées "figurantes" et une féministe lesbienne qui se prend un pain dans la gueule par Reedus !
Inutile donc de vous dire que le film est au final une sorte de mélange pas très glorieux de Tarantino (pour le sujet et l'humour noir décomplexé) et de John Woo à la sauce irlandaise (pour les gunfights au ralenti sur fond d'esthétique religieuse bien appuyée !).
C'est d'ailleurs ce dernier point qui coutera sa sortie au film. Car après le massacre du lycée Columbine en avril 2000, l'obsession "légèrement" démesurée de Duffy pour les armes à feu n'est pas très bien passée. Résultat : 35 000 dollars de recettes en salles et EPIC FAIL !
Mais tout cela aurait pu rester de l'ordre de l'anecdote sympa qu'on se raconte entre initiés. La légende Troy Duffy, c'est à un documentaire qu'on la doit. Sorti en 2004, OVERNIGHT a été réalisé par les ex-meilleurs potes de Duffy qui s'étaient dit que filmer son ascension à Hollywood ferait un bon film, chose à laquelle un égo comme celui de Duffy ne pouvait pas dire non... Sauf que de l'idée de départ ne reste pas grand chose puisque le roi du pétrole annoncé s'est vite transformé en gros loser, se ramassant la gueule aussi vite qu'elle avait enflé... Et c'est bien le problème (d'où le "ex"), l'homme n'ayant naturellement pas trop apprécié que ses potos se fassent de la tunasse sur son malheur et surtout le montre dans toute sa splendeur de beauf homophobe et égomaniaque...
Reste que des beaufs homophobes et égomaniaques, l'Amérique en compte quelques centaines de milliers et qu'ils ont finit par trouver la voix vers leur messie Troy Duffy : le DVD, cette merveille de technologie so 2001 qui permet à tout beauf homophobe de s'instruire devant sa télévision couleur. Dans une interview à EW, Troy Duffy raconte : "Il y a des jeux de boissons associés au film. Il y a des milliers de fans avec des tatouages. Vous ne pouvez pas acheter ce genre de fans." D'après Norman Reedus, "Des gens viennent vers moi avec mon visage tatoué sur un bras et celui de Sean sur l'autre. Je leur demande s'ils étaient saoul en faisant ça et à 99% ils me répondent que oui." Ça c'est sûr, des fans comme ça, on ne les achète pas. Mais encore faut-il en vouloir ?
Mais vous savez quoi ? Duffy n'a pas touché un centime sur les ventes de ces DVD à cause du contrat qu'il avait signé avec les distributeurs en 2000. Et oui, il était persuadé que le film serait un succès en salles... Too Bad. EPIC FAIL (tiens, ce serait pas le troisième ?)
Elles lui auront quand même permis de réaliser, neuf ans après le premier volet, une suite à THE BOONDOCK SAINTS. Sûrement toujours partant pour des orgies dans les jacuzzis et des virées chez les stripteaseuses (surtout que la plupart ne sont plus les jeunes premiers qu'ils étaient il y a 10 ans), une bonne partie du casting original est toujours là. L'esthétique irlando-tarantinesque des gunfights aux ralentis so 1995, aussi...
Sorti le week-end prochain aux Etats-Unis par le type qui fit de LA PASSION DU CHRIST le phénomène que l'on sait en surfant sur le fondamentalisme religieux, je crois qu'on peut d'avance ajouter un 4ème EPIC FAIL à la liste...
Pour bien visualiser le personnage, il faut vous imaginer l'allure mastoc d'un joueur de football tendance défenseur - comprenez gras du bide - le bouc de l'Américain moyen de rigueur et la boule à zéro. Car le premier métier de Duffy - peut-être même sa vocation - c'est barman. Mais pas barman de l'Hôtel Costes. Brman du J. Sloan's, un bouge de West Hollywood (la zone !) qu'il dirige armé d'une batte de base-ball. Un outil bien utile pour vider les quelques poivreaux, sauvageons et crackheads qui oseraient franchir les portes de son établissement. Je pense que vous voyez bien là de quoi on parle.
Des rêves de gloire plein la tête, Duffy veut se faire un nom à Hollywood. Pour ça, il a deux pistes : son groupe de rock The Brood et un scénario intitulé THE BOONDOCK SAINTS. S'inspirant de ses "envies" de vider les dealers de sa cage d'escaliers, il crée ainsi deux personnages, les frères McManus, tueurs à gages spécialisés dans l'élimination des seigneurs de la drogue de Boston avec le FBI à leurs trousses. On est en 1996 et l'époque est aux anti-héros criminels popularisés par Quentin Tarantino dans PULP FICTION.
C'est donc assez naturellement que le script finit par arriver sur le bureau de Harvey Weinstein, le Pygmalion de Tarantino, Kevin Smith et Robert Rodriguez. Normal que le mec s'intéresse à un type pas vraiment démoulé comme Duffy. Tellement normal qu'avec la folie des grandeurs qu'on lui connaît désormais, il lui offre 15 millions de dollars pour faire son film, accepte que The Brood enregistre la bande son et propose même de racheter le J. Sloan's !
Bref, en 1997, le barman crasseux de West Hollywood se transforme en Cendrillon d'Hollywood. C'est acté : Duffy est le "prochain Tarantino". Le deal avec Miramax fait même la couverture d'USA Today et l'apprenti-réalisateur rencontre alors Mark Wahlberg, Brendan Fraser, Vincent D'Onofrio, Billy Zane, Jeff Goldblum et même un jeune Heath Ledger. Le mec est le nouveau roi du pétrole !
Sauf que... (et c'est là que les versions divergent).
Dès la fin de l'année 1997, le deal avec Miramax est rompu (avant que Harvey ne rachète le bar - merde !). La raison ? D'un côté, on dit que Weinstein et Duffy n'était pas d'accord sur le casting et que les deux se sont séparés d'un commun accord. De l'autre, on dit que Duffy a pris une de ces grosses têtes qui vous font exploser en plein vol et que, trop occupé, refusait de parler à qui que ce soit - même si ce qui que ce soit s'appelait Pitt ou Stallone. Il se raconte même que Duffy manqua d'engager Ewan McGregor, lors de leur premier entretien, à cause d'une dispute futile sur la peine de mort ! EPIC FAIL.
Finalement, une autre société de prod financera quelques années plus tard le film à hauteur de 6 millions de dollars (soit 2 fois moins que les Weinstein !) avec un casting composé tout de même de Willem Dafoe (dans un rôle de grande folle totalement surréaliste), Billy Connolly et Sean Patrick Flanery et Norman Reedus dans les rôles des deux frères. Tournage somme-toute rock'n roll durant lequel les principaux protagonistes se rappellent surtout les beuveries dans la villa louée pour l'occasion, les barbecues, les "orgies" dans le jacuzzi et les virées dans les clubs de strip-tease. Je pense que vous saisissez le tableau... D'autant que les seuls personnages féminins du film sont au choix deux prostituées "figurantes" et une féministe lesbienne qui se prend un pain dans la gueule par Reedus !
Inutile donc de vous dire que le film est au final une sorte de mélange pas très glorieux de Tarantino (pour le sujet et l'humour noir décomplexé) et de John Woo à la sauce irlandaise (pour les gunfights au ralenti sur fond d'esthétique religieuse bien appuyée !).
C'est d'ailleurs ce dernier point qui coutera sa sortie au film. Car après le massacre du lycée Columbine en avril 2000, l'obsession "légèrement" démesurée de Duffy pour les armes à feu n'est pas très bien passée. Résultat : 35 000 dollars de recettes en salles et EPIC FAIL !
Mais tout cela aurait pu rester de l'ordre de l'anecdote sympa qu'on se raconte entre initiés. La légende Troy Duffy, c'est à un documentaire qu'on la doit. Sorti en 2004, OVERNIGHT a été réalisé par les ex-meilleurs potes de Duffy qui s'étaient dit que filmer son ascension à Hollywood ferait un bon film, chose à laquelle un égo comme celui de Duffy ne pouvait pas dire non... Sauf que de l'idée de départ ne reste pas grand chose puisque le roi du pétrole annoncé s'est vite transformé en gros loser, se ramassant la gueule aussi vite qu'elle avait enflé... Et c'est bien le problème (d'où le "ex"), l'homme n'ayant naturellement pas trop apprécié que ses potos se fassent de la tunasse sur son malheur et surtout le montre dans toute sa splendeur de beauf homophobe et égomaniaque...
Reste que des beaufs homophobes et égomaniaques, l'Amérique en compte quelques centaines de milliers et qu'ils ont finit par trouver la voix vers leur messie Troy Duffy : le DVD, cette merveille de technologie so 2001 qui permet à tout beauf homophobe de s'instruire devant sa télévision couleur. Dans une interview à EW, Troy Duffy raconte : "Il y a des jeux de boissons associés au film. Il y a des milliers de fans avec des tatouages. Vous ne pouvez pas acheter ce genre de fans." D'après Norman Reedus, "Des gens viennent vers moi avec mon visage tatoué sur un bras et celui de Sean sur l'autre. Je leur demande s'ils étaient saoul en faisant ça et à 99% ils me répondent que oui." Ça c'est sûr, des fans comme ça, on ne les achète pas. Mais encore faut-il en vouloir ?
Mais vous savez quoi ? Duffy n'a pas touché un centime sur les ventes de ces DVD à cause du contrat qu'il avait signé avec les distributeurs en 2000. Et oui, il était persuadé que le film serait un succès en salles... Too Bad. EPIC FAIL (tiens, ce serait pas le troisième ?)
Elles lui auront quand même permis de réaliser, neuf ans après le premier volet, une suite à THE BOONDOCK SAINTS. Sûrement toujours partant pour des orgies dans les jacuzzis et des virées chez les stripteaseuses (surtout que la plupart ne sont plus les jeunes premiers qu'ils étaient il y a 10 ans), une bonne partie du casting original est toujours là. L'esthétique irlando-tarantinesque des gunfights aux ralentis so 1995, aussi...
Sorti le week-end prochain aux Etats-Unis par le type qui fit de LA PASSION DU CHRIST le phénomène que l'on sait en surfant sur le fondamentalisme religieux, je crois qu'on peut d'avance ajouter un 4ème EPIC FAIL à la liste...
Bizarrement ton papier m'a donné envie de voir le doc', mais pas du tout les fils du bonhomme ! Je me demande si Peter Biskind ne parle pas de l'affaire avec Miramax dans "Sexe, Mensonges et Hollywood". Faudrait que j'y rejette un oeil à l'occasion.
RépondreSupprimerLe pire c'est que le premier BOONDOCK est vraiment culte aux States. IL y a véritablement des mecs qui vouent un culte à l'oeuvre de Duffy et attendent avec impatience de voir la suite !
RépondreSupprimerMoi je trouve que le premier opus et un très bon divertissement (en vost car la vf est vraiment mal doublée je trouve)et je le conseil vraiment à tout le monde dans l'optique ou on attend pas que ce film nous fasse réfléchir.
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